LA DÉMOLITION DU CHÂTEAU
La démolition du château de Flayosc est un évènement fondamental dans l’Histoire de notre commune. En pleine Révolution, Alexandre de Villeneuve, marquis de Flayosc, s’est enfui de Flayosc pour aller se réfugier à Aix en Provence, en attendant que les esprits de ses vassaux « fussent revenus au calme de la raison d’où ils paraissaient s’être éloignés ». A l’époque, les avis des Flayoscais sont partagés quant au sort à accorder au marquis et à ses biens, mais sa fuite ainsi que la situation économique de la région vont vite enflammer les esprits et le 3 mai 1792, à 10 heures du soir, la population exaspérée entame le pillage puis la démolition du château, avec à sa tête, le maire en personne, Jean François Bérard.
Le lendemain matin, le directoire du district de Draguignan alerté par la rumeur publique, réquisitionne la garde nationale de Draguignan et se porte à la tête de leurs corps respectifs afin de protéger la maison d’Alexandre de Villeneuve. Une fois sur place, il trouve une délégation de nombreux Flayoscais, conduite par le maire, les officiers municipaux, écharpes en bandoulière, et le juge de paix. Ces derniers, loin de nier la destruction, déclare que la démolition est l’œuvre non de quelques individus mais de toute la population de Flayosc et prend pour argument que le château, situé sur une proéminence pesait sur les citoyens. Il propose d’ailleurs de faire voter une délibération concernant un éventuel dédommagement envers le propriétaire, dédommagement qui n’aura jamais lieu. Voulant éviter un affrontement avec une population qui grandissait dans les rues, le directoire fait demi-tour et rentre penaud à Draguignan. Vous retrouvez en pièces annexes la totalité du compte-rendu du directoire du district du 4 mai et dont voici quelques morceaux choisis:
Aujourd’hui cinq may mil sept cent quatre vingt douze l’an quatrième de la liberté
Le directoire du district de Draguignan, M. le procureur sinedie qui a arreté que le procès verbal de ses commissaires députés à raison des troubles survenus à flayosc et denomés par la clameur publique sera transmis ainsi qu’il suit.
« Le quatre may mil sept cent quatre vingt douze, le directoire du district, ayant appris à sept heures du matin et par la clameur publique que l’on devastoit le ci-devant château de Flayosc qu’on travailloit à le démolir, affligé d’un pareil désordre et étonné surtout que la municipalité du lieu n’en sut donné aucun avis, n’en eut pas dénomé le projet a l’effet d’en prévenir l’exécution par des mesures convenables mais ne pouvant pas douter de la vérité en fut attesté par nombre de personnes et jaloux enfin d’arrêter les suites d’un pareil désordre aurait verbalement délibéré vu l’urgence de requérir M. le commandant de la garde nationale et M. le lieutenant commandant la gendarmerie à l’effet de se porter à la tête de leurs corps disputifs dans le lieu de flayosc pour y agir ainsi qu’il y serait avisé….
…Arrivés sur les limites du territoire de flayosc, nous y aurions trouvé le sieur berard maire à la tête des officiers municipaux tous décorés de leurs écharpes, le sieur lombard juge de paix et nombre de citoyens rangés derrière eux…
…le maire nous aurait répondu, que les faits que nous lui aurions retracés, étaient vrais ; que le délit était constant, mais qu’il n’était pas l’ouvrage de certains individus mais celui de toute l’habitation, que tous les citoyens et eux mêmes maire et officiers municipaux et juge de paix avait eu part à l’exécution du projet ; que la vue de ce ci-devant château placé sur une éminence et dominant tout le lieu pesait sur les citoyens et que tous avaient cédé à l’impatience de s’en délivrer… »
Le directoire fera aussitôt proclamer dans toutes les communes du district l’urgence à faire l’état des biens et des fonds des émigrés c’est-à-dire des nobles ayant fui le pays.
Vous trouverez aussi en pièce annexe la délibération du 10 mai 1792 à Flayosc qui entérine cette décision :
« Conseil municipal de la commune de Flayosc du dix du mois de mai mille sept cent quatre vingt douze auquel Conseil, convoqué par billets portés par Jean Clavier, valet de veille, ont été présents les sieurs Jean François Bérard maire, Pierre Franc, François Leidet, Henrri Chieusse, Louis Leidet procureur de la Commune.
Le sieur maire représente à l’assemblée qu’en vertu de l’article sept de l aloi du huit avril dernier relative au bien des émigrés chaque municipalité envoie au directoire de son district l’état des biens situés dans son territoire appartenant à des personnes qu’elle ne connaitra pas pour être actuellement domiciliés dans ce département ainssi que les ventes prestations et autres redevences qui leur sont dues, et comme dans notre municipalité, sieur alexandre villeneuve que nous scavons être sorti du royaume depuis la révolution y être encore rentré et resorti de nouveau sans scavoir s’il y est aujourd’hui, possède dans notre commune différents effets, le sieur maire pour se conformer au dit article sept de la susdite loi, pense que la municipalité devrait faire un état de tout les effets pour l’envoyer de suite au directoire du district de draguignan.
Sur laquelle proposition l’assemblée, ouï monsieur le procureur de la commune a unanimement délibéré de faire l’état des biens, rentes, prestations, et redevences, au plutôt, du sieur alexandre villeneuve et de l’envoyer de suite au directoire du district de draguignan pour aviser ce qu’il appartiendra.
Plus n’a été délibéré.
Signatures :
Bérard maire
Remy Chieusse officier municipal
Leidet Officier municipal
Leidet procureur de la commune
Trouin secrétaire »
Procès verbal du directoire du district de Draguignan page 1 (4 mai 1792)
Procès verbal du directoire du district de Draguignan page 2 (4 mai 1792)
Procès verbal du directoire du district de Draguignan page 3 (4 mai 1792)
Compte rendu du conseil municipal à propos des biens des Villeneuve (10 mai 1792)